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Peu de films ont joué un rôle aussi important dans l'histoire du cinéma : en retraçant, dès 1945, un moment particulièrement tragique de l'occupation allemande à Rome, Roberto Rossellini ouvrait la voie au néoréalisme. Rompant avec les artifices du studio, le cinéma néoréaliste descend dans la rue avec l'ambition de parler de la vie dans ce qu'elle a de plus crucial. Tout de suite après la libération de Rome, c'est l'histoire du prêtre don Morosini, exécuté par les Allemands, que Rossellini juge importante à raconter. Le destin de ce curé entré en résistance reflète l'esprit de sacrifice de ceux qui ont lutté contre la barbarie avec les armes de la foi en la liberté.
Dans Rome, ville ouverte, don Morosini devient don Pietro, interprété par Aldo Fabrizi, célèbre à l'époque pour ses talents comiques. Son visage jovial donne au personnage une franche bonhomie. Avec l'aide de Fellini, qui collabore au scénario, ce don Pietro a même parfois une certaine drôlerie (quand il assomme un vieillard pour lui sauver la vie), mais Rossellini n'en retombe pas, pour autant, dans les conventions. Refusant de sanctifier ses personnages, il les montre dans leur humanité simple, dans leur grandeur familière. C'est vrai aussi, et de manière exemplaire, de Pina, la femme à la fois meurtrie par la vie et toujours vaillante jouée par Anna Magnani. Figure du sacrifice elle aussi, Pina, cependant, incarne d'abord le courage, l'élan généreux de la rébellion. Un film sublime. — Frédéric Strauss