SOMMEIL D’OR

Sorti il y a dix ans, Le sommeil d’or est un documentaire rare et fort. Fort déjà par son sujet :
l’annihilation du cinéma cambodgien. En plein boom dans les années 60, mélange de culture
populaire et de fantasme capitaliste, celui-ci est saccagé brutalement par les Khmers Rouges dès
leur arrivée au pouvoir en 1975. Ils déportent et tuent ses acteurs, réalisateurs, producteurs, font
disparaître les films et transforment les cinémas en guinguettes. Des décennies plus tard, Davy
Chou, jeune réalisateur franco-cambodgien, vient recueillir la parole des survivants, c’est une parole
arrachée à la nuit. Sans effet de style mal placé, sans l’appui d’images extérieures non plus (pas
d’archives, pas d’extraits ou rushes retrouvées, rien : que du présent), quasi à l’os, le film sort des
limbes ce monde perdu en mobilisant non seulement les souvenirs des survivants mais aussi
l’imaginaire du spectateur. Le cinéma, comme art de la croyance et de la confiance en quelque
sorte.